Jeudi 6 avril
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Les intrusions d'Akermann dans ses territoires de cueillette prenaient des tournures très variées : rapide aller-retour, baguenaudage, mais quand le frai était à son goût il faisait le beau, papillonnait, certaines vendeuses lui souriaient, d'autres le flattaient, entraient dans son jeu, et il les ignorait, trop facile, au beurre Akermann préfèrait le silex, celles qui le tenaient à distance intriguées par ce grand type, élégant et précieux, qui tirait des bords entre les cintres, tripotait jupes et chemisiers. Akermann s'en tenait toujours à ce type de pièces, simples à manipuler, disait-il, en réalité elles étaient l'essentiel de ce qu'il aimait ôter aux femmes désirées; les rétives.
Au soir de ses virées, affalé dans un fauteuil du bar Ernest, où maraudait Bohringer en tongs bleus, bronzé comme une vieille pute, Akermann racontait. Face à lui, Del Orto, l'écoutait en sirotant des hypocrites : du Calvados noyé dans le jus d'oranges pressées. Il connaissait la chanson par coeur, paroles et musique, mais dans les vapeurs d'alcool qui embuaient ses petits yeux porcins ça lui semblait à chaque fois nouveau.
Akermann s'enflammait. Sa nouvelle moisson de belles inaccessibles, toutes bâties sur le même modèle, des blondes de blé, fausses, arachnéennes, en chair sans trop de pulpe, de longs compas, des lianes fermes, garces et femme-enfant, mariées si possible, élégantes, du chic et du chien, des petites reines blanches, transparentes et insignifiantes, qu'il posait sur un piedestal pour mieux les honorer.